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ACTUALITÉS ÉCONOMIQUES
PLASTIGOM, exemple de l’industrie française agile
Interview d’Annelise Morin, Dirigeante
L’entreprise Plastigom spécialisée dans la fabrication de chaussons et chaussures depuis 1928 compte aujourd’hui 16 salariés installés dans l’usine de Champagné.
Reprise en 2011 par Annelise Morin, l’activité représente chaque année 60 000 paires commandées dans 500 magasins clients partout en France, générant un CA annuel d’1,4 million d’€.
Un arrêt total de l’activité, puis le rebond
« Notre activité s’est arrêtée du jour au lendemain dès le vendredi 13 mars car le samedi 14 le gouvernement annonçait la fermeture des commerces non essentiels. Nous devions partir en salon ce week-end là et avons du tout stopper tant dans la distribution de nos produits que dans notre production. Mars est pour nous le plus gros mois pour nos livraisons en magasins. A l’époque, nous avions déjà livré 40% de notre carnet de commande. Malheureusement, tout ce qui a été expédié le jeudi nous est revenu car les magasins fermaient.
Nous avons continué à travailler jusqu’au mardi midi pour réceptionner nos colis non livrés ; j’ai ensuite mis tout le monde en chômage partiel.
A partir du jeudi, j’ai reçu un mail de la direction des armées qui recherchait des fabricants pour réaliser des masques en textile. J’ai tout de suite fait revenir une personne pour essayer de confectionner des prototypes avec notre tissu, puis nous avons vite constaté que ce n’était techniquement pas suffisant et qu’il nous fallait trouver le bon tissu adapté pour garantir un masque à la fois filtrant et respirant. Nous l’avons trouvé chez un fabricant français via la plateforme collaborative « savoir-faire ensemble ».
J’ai pris le risque de commander une grande quantité avant même de recevoir l’accord de la DGA ».
Passer une production 100% chaussons à 100% de masques en quelques jours
« La production de masques a occupé toute l’équipe pendant tout le mois d’avril. Nous avons même formé 2 personnes en plus. Jusqu’à début mai 60 000 masques ont été fabriqués ; en avril les masques représentaient 100% des commandes ; aujourd’hui nous n’en avons plus aucune.
Ma chance est que je n’ai pas eu besoin d’adapter mon outil industriel ; nous avons juste dû l’entretenir plus souvent que d’habitude ! Je n’ai donc pas eu besoin d’investir pour adapter mon outil. Nous avions tout pour répondre à la demande ; rebondir était évident.
Le risque pris en passant ma commande de matière avant de recevoir l’agrément de la DGA m’a donné un avantage concurrentiel de taille : j’ai pu répondre tout de suite à la demande et être très rapidement identifiée car nous étions dans les premiers fournisseurs à être diffusés. C’est une chance quand on sait que j’ai mis 4 jours à obtenir mon évaluation DGA alors que d’autres ont mis 1 mois à l’obtenir après moi.
Etre référencée dans les listes officielles dès le début nous a apporté énormément de commandes. Je passais ma journée au téléphone et bien souvent devais refuser des commandes qui étaient trop importantes compte tenu de ma capacité de production. Je n’avais jamais connu cette situation de refuser une commande ! Nous avons privilégié les commandes locales car ma motivation principale était de d’abord rendre service aux entreprises et collectivités locales. Cette priorisation territoriale des commandes combinée à la production à la commande passée nous a permis de n’avoir aucune annulation de commande ni aucun stock de masque.
Aujourd’hui nous finissons la production de ces commandes. En mai, nous avons repris la production de chaussures en parallèle de celle des masques avec l’ouverture des magasins lors du déconfinement. Nous avons alors également pu livrer nos colis qui attendaient depuis mars.
Pour assurer la santé de l’entreprise au mieux, différents dispositifs d’aides ont été activés : le chômage partiel, le prêt garantie état et le report de charges par l’Urssaf. »
Des efforts qui ont payé
« Pour notre activité classique, comme nos représentants ne pouvaient plus rendre visite à nos clients pour montrer et faire essayer nos produits nous avons envoyé nos catalogues par courrier et mails mais avec moins de retombées puisque notre produit nécessite d’être touché et essayé. Fort heureusement les commandes reviennent en nombre depuis le déconfinement.
Cette activité de masques devenue opérationnelle dans l’urgence a permis de faire connaître davantage l’entreprise et ses produits traditionnels. Plusieurs médias locaux et nationaux ont cité et montré le savoir-faire de l’entreprise, ce qui a également contribué à faire connaître l’activité principale.
Grâce à cette expérience et au stock de matière première, nous sommes prêts à reprendre la production en cas de nouvelle vague épidémique. Nous connaissons notre capacité maximale de production à savoir 2000 masques fabriqués / jour. Le gouvernement a récemment missionné deux entreprises pour qu’elles repèrent les fabricants français de masques en tissus auxquels faire appel en continu sur l’année pour les besoins nationaux. Nous espérons faire partie des entreprises retenues pour ces commandes nationales, cela permettrait de pérenniser cette nouvelle gamme de produits ».
Opportunités et choix stratégiques : le positif de cette crise
« Le positif de cette période en tant que professionnelle de la confection est que nous avons quand même profité et savouré cette vraie mise à l’honneur du made in France ! J’espère que ça ne va pas retomber d’un coup. Nous nous satisfaisons vraiment d’avoir fait ce choix il y a quelques années de conserver notre outil et notre savoir-faire français.
Je me réjouis d’avoir réussi à compenser la perte : la production de masque n’a pas apporté plus de rentrées d’argent mais nous a permis de combler la perte de l’activité principale sur les chaussures.
Cette période de pertes de repères m’a également amenée à découvrir et à utiliser pour la première fois les outils collaboratifs. Ça m’a boostée de voir la bienveillance et l’entraide des autres fabricants, ça remotive !
Mon expert comptable a été un appui incontournable pendant toute cette période ! D’autres partenaires ont été également clés dans la traversée de ces mois de confinement : Amandine Urbain la graphiste avec qui nous travaillons sur les réseaux sociaux qui n’a pas hésité à faire plus que notre demande dans un esprit de solidarité face aux enjeux sanitaires et économiques, et l’imprimeur Galaxy n’a pas hésité à imprimer nos notices d’utilisation des masques dans l’urgence pour tenir les délais ! »
Contact : commercial@la-vague.fr
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